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mercredi 23 juillet 2025

Bergson le Grand Philosophe du XXème siècle


Henri Bergson (1859-1941), l’un des philosophes les plus influents du tournant du XXe siècle, est connu pour sa tentative de réconcilier la philosophie avec la vie, en insistant sur des concepts comme la durée, l’élan vital et l’intuition. Issu d’une famille juive – son père, Michał Bergson, était un musicien juif polonais, et sa mère, Katherine Levison, était d’origine juive anglaise

Son héritage juif, bien que discret, a pu influencer subtilement sa pensée, notamment dans sa conception du temps, de l’intuition et de la créativité. Cet essai explore comment son éducation dans un contexte juif a pu inspirer sa philosophie, en mettant en lumière les parallèles entre sa pensée et certains aspects de la tradition juive, tout en intégrant des citations emblématiques pour illustrer ces liens.

Contexte de l’éducation juive de Bergson

Bergson est né dans une famille juive cultivée, Son père, un pianiste et compositeur, et sa mère, issue d’une famille juive anglaise, lui ont offert un environnement cosmopolite, entre la Pologne, l’Angleterre et la France. Juif dit laïc, il s’oppose aux lois ségrégationnistes du régime de Vichy(par solidarité avec les Juifs persécutés) son héritage juif a pu façonner sa sensibilité philosophique.

La tradition juive, avec sa richesse intellectuelle, son accent sur le temps, la mémoire et l’éthique, offre des parallèles fascinants avec les concepts bergsoniens, même si ces influences restent implicites.

Le judaïsme et la conception bergsonienne du temps (la durée)

Un des concepts centraux de Bergson est la durée, qu’il définit comme un temps qualitatif, un flux continu d’expériences vécues, par opposition au temps mécanique des horloges. Dans L’Évolution créatrice (1907), il écrit : « Le temps est invention, ou il n’est rien du tout.

» Cette vision du temps comme un processus créatif et dynamique résonne avec la conception juive du temps, qui n’est pas linéaire mais chargé de sens spirituel et historique.

Dans le judaïsme, le temps est marqué par des cycles (sabbat, fêtes) et une mémoire collective qui relie le passé au présent dans un continuum vivant. La centralité de la mémoire dans la tradition juive – par exemple, le commandement de se souvenir (zakhor) de l’Exode ou du Shabbat – pourrait avoir inspiré, l’idée bergsonienne que la conscience est un « trait d’union entre ce qui a été et ce qui sera, un pont jeté entre le passé et l’avenir » (L’Énergie spirituelle, 1919).

Dans la pensée juive, le temps n’est pas une simple succession d’événements, mais une expérience qualitative où chaque moment porte une signification éthique et spirituelle.

La notion de durée chez Bergson, qui met l’accent sur la fluidité et la créativité du temps, peut être vue comme une transposition philosophique de cette sensibilité juive.

Par exemple, la Kabbale, une tradition mystique juive, explore le temps comme une émanation divine, un flux continu qui transcende les catégories humaines.

Bien que Bergson n’ait pas directement puisé dans la Kabbale, son enfance dans un milieu juif, même sécularisé, a pu l’exposer à des récits et des pratiques où le temps est vécu comme une force vivante, non réductible à une mesure.

L’intuition et les limites du langage : une résonance avec la mystique juive

Bergson soutient que le langage, bien qu’essentiel à l’humanité, est limité dans sa capacité à saisir la complexité de la pensée et de l’expérience.

Dans Introduction à la métaphysique (1903), il déclare : « L’intuition est ce qui donne accès à la réalité profonde des choses, là où l’analyse échoue. » Cette idée trouve un écho dans la tradition juive, où le langage est à la fois sacré et insuffisant pour capturer la totalité de la vérité divine.

Dans la pensée juive, la Torah est vue comme une parole divine infinie, mais son interprétation, à travers le midrash ou le Talmud, révèle que le langage humain ne peut jamais épuiser le sens.
Cette approche interprétative, qui valorise la pluralité des significations, pourrait avoir influencé la méfiance de Bergson envers les concepts figés et son plaidoyer pour l’intuition comme mode de connaissance.
La mystique juive, notamment la Kabbale, met l’accent sur une connaissance intuitive ou spirituelle qui transcende le langage. Les kabbalistes décrivent souvent l’expérience de Dieu comme une réalité ineffable, accessible par une forme d’intuition

Son insistance sur l’intuition comme moyen de saisir la durée et l’élan vital pourrait refléter une sensibilité héritée de cette tradition juive, où la vérité profonde échappe aux mots et demande une immersion dans l’expérience vécue.

Cette idée se retrouve dans sa célèbre affirmation : « Exister, c’est changer, changer c’est mûrir, mûrir c’est se créer indéfiniment soi-même » (L’Évolution créatrice, 1907), qui célèbre la créativité et le mouvement, des thèmes compatibles avec la vision juive de la vie comme un processus dynamique de transformation.

Éthique et responsabilité : un écho de l’héritage juif

L’éducation juive de Bergson, même sécularisée, a probablement instillé en lui une sensibilité à l’éthique et à la responsabilité collective, des valeurs centrales dans le judaïsme.

Dans Les Deux Sources de la morale et de la religion (1932), Bergson distingue une morale statique, issue des conventions sociales, d’une morale dynamique, portée par des individus créateurs et inspirés. Cette distinction peut rappeler l’idée juive d’une éthique en évolution, où des figures comme les prophètes ou les sages réinterprètent la loi pour répondre aux besoins du moment.

Bergson écrit : « L’univers est une machine à faire des âmes » (Les Deux Sources), suggérant une vision du monde où l’évolution tend vers une spiritualité croissante, une idée qui pourrait faire écho à l’eschatologie juive, où l’histoire humaine progresse vers une rédemption spirituelle.

Sa décision de rester solidaire des Juifs sous le régime de Vichy, refusant une exemption des lois antisémites témoigne d’un sens profond de la responsabilité éthique. Ce choix reflète peut-être l’influence d’une éducation juive qui valorise la solidarité communautaire et la justice, des principes ancrés dans des commandements comme tzedakah (charité) et tikkun olam (réparation du monde).

Une influence subtile mais profonde

Bien que Bergson n’ait pas explicitement lié sa philosophie à son héritage juif, son éducation dans une famille juive cosmopolite a pu façonner sa pensée de manière subtile.

Sa conception de la durée résonne avec la vision juive du temps comme une expérience vivante et spirituelle. Sa valorisation de l’intuition face aux limites du langage fait écho à la tradition juive, où la vérité divine est infinie et accessible par une approche intérieure. Enfin, son sens de l’éthique et de la responsabilité reflète des valeurs juives fondamentales, même sécularisées. Comme il l’écrit dans L’Énergie spirituelle : « Penser en homme d’action, agir en homme de pensée. » Cette maxime incarne sa volonté de rendre la philosophie vivante, un projet qui pourrait avoir été nourri par la richesse de son héritage juif, où la pensée et l’action s’entrelacent dans une quête de sens.
Pour ceux qui se demandent si Bergson peut réconcilier avec la philosophie, son approche, ancrée dans l’expérience vécue et la créativité, offre une porte d’entrée accessible et inspirante.

Son héritage juif, ajoute une profondeur culturelle à sa pensée, la rendant universelle tout en étant enracinée dans une tradition de questionnement et de vitalité spirituelle.

Il décède en pleine guerre en 1941.

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