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mardi 9 septembre 2025

Hommage à Maître Lyon-Caen. (FR). JBCH N° 352

Sous Napoléon Ier, après la Révolution française, a créé le Code Civil,  l’intégration des Juifs dans la société fut conditionnée par une série de réformes. En 1808, Napoléon promulgue les “décrets de Bayonne”, qui obligent les Juifs à adopter des noms de famille fixes et héréditaires, alors que beaucoup ne portaient jusque-là que des prénoms suivis d’un patronyme (ex. « Moïse fils de Jacob »). 

Pourquoi ont ils adopté des noms de villes ou provinces ?

Pour des pratiques administratives : Les autorités ont parfois attribué aux familles des noms inspirés de leurs lieux d’origine (ex. Alsace, Metz, Bloch = de Bloch/Blochheim en Alsace, Bordeaux, Lyon, Toulouse, Caen, Narbonne, Lunel, Besançon ). 

Volonté d’intégration : Ces noms de villes ou provinces (Picard)  « francisaient » les Juifs et facilitaient leur assimilation dans l’État moderne. Choix imposés ou orientés : Certains Juifs ont choisi volontairement un nom lié à leur région ; d’autres se sont vus imposer un nom par les fonctionnaires. Uniformisation sociale : Napoléon voulait en finir avec l’usage des surnoms hébraïques ou yiddish et donner aux Juifs une identité civile conforme aux normes de l’Empire. Crémieux (de Crémieu, en Dauphiné) Bordeaux, Toulouse, Bloch (Alsace) Halévy (de Halevi, mais francisé) Dreyfus (de Trèves, en Allemagne).




Si l’on devait dessiner la trajectoire de Pierre Lyon-Caen, peut-être faudrait-il retenir le symbole d’une ligne droite, exigeante, mais marquée d’une fracture initiale : celle de la perte précoce et brutale de ses parents pendant la Seconde Guerre mondiale. Descendant d’une illustre famille de juristes juifs, il a grandi dans l’ombre du drame, avant d’élever, par sa carrière et par son humanité, une figure exemplaire de magistrat et de citoyen engagé



Né à Paris le 28 février 1939, Pierre Lyon-Caen n’a que quatre ans lorsque son père, François, avocat aux Conseils, est arrêté par la police française puis déporté à Auschwitz, où il meurt. Sa mère était déjà décédée l’année précédente d’une maladie. Orphelin, il est confié à ses grands-parents paternels avec son frère et sa sœur. 


La guerre frappe la famille avec une dureté extrême : son grand-père Léon, président de chambre à la Cour de cassation, est exclu de ses fonctions en 1940 parce que juif, et perd trois de ses fils : l’un à Auschwitz, deux autres sur le front. Cette tragédie familiale, qui se mêle à l’histoire du judaïsme français et aux blessures de la Shoah, a forgé en Pierre Lyon-Caen un rapport pudique à son enfance et un attachement profond aux valeurs de justice et de dignité humaine.



Dans cette lignée de juristes marqués par la rigueur et le sens du service public, Pierre Lyon-Caen s’impose rapidement. Major de sa promotion en 1967 à l’École nationale de la magistrature, il incarne à la fois la continuité d’une tradition et le souffle d’une génération qui aspire au changement. 


En 1968, au cœur d’un climat de contestation et de réforme, il cofonde avec Claude Parodi, Dominique Charvet et Louis Joinet le Syndicat de la magistrature. Son engagement n’est pas celui d’un idéologue radical, mais d’un social-démocrate soucieux de rendre la justice plus indépendante, moins soumise aux hiérarchies et aux pressions politiques.



Son parcours l’amène à occuper des postes variés : juge d’instruction à Versailles, président du tribunal de Pontoise, procureur de Nanterre. Son passage auprès de Robert Badinter au ministère de la Justice, lors de la présidence Mitterrand, témoigne de sa proximité avec les combats majeurs de l’époque, notamment l’abolition de la peine de mort et la modernisation de la justice.




Certaines affaires jalonnent sa carrière de blessures profondes. La plus marquante fut la prise d’otages de Neuilly en mai 1993, lorsque le « Human Bomb » retint vingt et un enfants dans une école maternelle. Négociateur, Pierre Lyon-Caen fut tenu à l’écart au moment où le RAID décida d’abattre le preneur d’otages. Cette décision le hantera toujours : il confiera plus tard avoir eu le sentiment amer de ne pas avoir pu aller jusqu’au bout de sa mission, et de voir disparaître une possibilité de sauver une vie. 


Cette lucidité, loin de le fragiliser, montre combien sa conception de la justice n’a jamais été abstraite : elle restait ancrée dans la valeur de chaque existence humaine.


Nommé avocat général à la Cour de cassation en 1994, Pierre Lyon-Caen s’impose comme un expert reconnu en droit social. Mais sa carrière institutionnelle ne l’a jamais enfermé dans une tour d’ivoire. Il s’engage après sa retraite auprès des plus vulnérables : migrants, détenus en réinsertion, justiciables modestes. Derrière l’austérité apparente de ce magistrat rigoureux, il y avait une profonde humanité, une conviction que le droit devait être au service des plus faibles.





Pierre Lyon-Caen fut aussi un passeur de mémoire. Sans en parler beaucoup, il portait en lui l’héritage des siens : une famille juive brisée par la guerre, mais qui n’a jamais cessé de croire en la force du droit et en la dignité de la justice. Cet héritage s’incarne dans sa discrétion, sa pudeur et sa rectitude morale. 


« Entre l’homme privé et l’homme public, il y avait une parfaite continuité », résume son neveu Thomas Lyon-Caen. Et c’est peut-être là le plus bel hommage : une vie sans duplicité, où la fidélité aux principes s’est exprimée avec constance, dans les fonctions les plus élevées comme dans les engagements les plus modestes.


Mort à Paris le 23 août 2025 à l’âge de 86 ans, Pierre Lyon-Caen laisse derrière lui l’image d’un magistrat hors pair, mais aussi d’un homme profondément marqué par l’histoire de sa famille juive et du siècle. 

Héritier d’une grande lignée, orphelin de la guerre, acteur majeur de la justice contemporaine, il a incarné une exigence morale rare. Dans un temps où l’indépendance de la justice est encore et toujours débattue, son parcours rappelle que la rigueur, la pudeur et l’humanité ne sont pas des qualités accessoires, mais l’essence même de la fonction de juger.






© 2025 JBCH. Tous droits réservés. Reproduction du texte interdite sans autorisation


Cet article est personnel, je ne prétends pas être ni un scientifique, ni un historien, ni un professionnel du journalisme...
 

C'est  délicat de témoigner quand on est un profane, mais dans ce blog,  j'exprime en général un coup de coeur 

d'après l'actualité , et le lecture de ma revue de presse internationale quotidienne

L' Afrique et ses matières premières. (FR). JBCH N° 351


Depuis les premières vagues de colonisation par la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne, l’Italie et la Belgique, l’Afrique a longtemps été perçue comme un territoire à exploiter, et non comme un partenaire économique. 


Aujourd’hui, un changement profond s’opère. Le continent, riche en minerais indispensables à la transition énergétique mondiale : cobalt, lithium, manganèse, bauxite, cuivre, uranium refuse de continuer à être « saigné à blanc ». 


Face à cette demande croissante, les pays africains imposent désormais un nouveau paradigme : coopération et développement local plutôt qu’exportation brute et dépendance. Mais les nouveaux vampires (Chine, Russie ..) restent vigilants et pillent une grande partie des richesses 



La stratégie africaine repose sur plusieurs leviers. D’une part, certains pays interdisent ou limitent l’exportation de minerais bruts. La Guinée, l’Ouganda et la Namibie ont mis en place des règles strictes, tandis que le Ghana, le Rwanda et la Zambie encouragent la construction d’usines de raffinage sur leur territoire. 




Ces mesures permettent aux États africains de capter une plus grande part de la valeur ajoutée et de renforcer leurs économies locales. La République démocratique du Congo, par exemple, a récemment conclu un accord avec les États-Unis pour cesser de soutenir les groupes rebelles dans l’est du pays, permettant ainsi une exploitation plus stable et régulée des minerais. 


Le Rwanda, quant à lui, entend devenir un pôle de raffinage pour les minéraux congolais, illustrant la volonté de transformer la matière première sur place plutôt que de l’exporter brute.


D’autre part, ces politiques redistribuent le pouvoir dans les relations internationales. La Russie, la Chine, les États-Unis, la Turquie et l’Iran multiplient les initiatives pour sécuriser l’accès aux matières premières africaines. 




Les investisseurs étrangers, qu’ils soient étatiques ou privés, doivent désormais composer avec de nouvelles règles locales. Les compagnies chinoises, par exemple, construisent actuellement des usines de raffinage de lithium au Zimbabwe et de manganèse au Ghana, tandis que des projets de fabrication de batteries pour véhicules électriques sont à l’étude en Zambie et au Congo. 


Si ces investissements apportent un savoir-faire technique et un financement, leur succès dépendra de la capacité des gouvernements africains à intégrer ces projets dans une stratégie de développement local.


Les exemples récents démontrent que l’Afrique peut tirer parti de cette nouvelle donne. La “ceinture de cuivre” entre le Congo et la Zambie renferme la moitié des réserves mondiales de cobalt et d’importants gisements de cuivre et de platine. 



Pourtant, plus de 70 millions d’habitants vivent dans la pauvreté, tandis que les minerais continuent d’être exportés bruts pour être transformés ailleurs et réimportés à prix majoré. 


Des échecs, il y en a comme la rainerie russo-malienne à Bamako, la nationalisation désastreuse de la mine d’uranium nigérienne de Somaïr, ou la mise sous administration provisoire de mines d’or au Mali sous le contôle de l'ex Wagner- Africa Corps, illustrent la volonté des États africains d'essayer en vain de reprendre le contrôle de leurs ressources. 


Or au Mali sous contrôle russe


Pour les dirigeants africains, il s’agit d'essayer d’assurer la souveraineté économique et de générer des revenus qui profitent directement à la population, ce qui n'est pas le cas.


Les restrictions à l’exportation favorisent la contrebande et la corruption, comme l’a montré le Zimbabwe en 2022, où l’interdiction d’exporter du minerai brut a alimenté un marché parallèle. 


Les litiges entre gouvernements et sociétés étrangères, comme ceux impliquant Orano au Niger ou Barrick Gold au Mali, rappellent que la nouvelle donne africaine nécessite un cadre juridique plus solide et une gouvernance efficace. 


Par ailleurs, la compétition mondiale pour les ressources africaines est féroce. La Chine et les États-Unis, notamment, cherchent à sécuriser leur approvisionnement pour la transition énergétique et l’industrie technologique. L'incapacité de ces pays africains à négocier est flagrante.


En définitive, l’Afrique ne voudrait plus être un simple fournisseur de matières premières. Elle chercherait en vain  à capter la valeur ajoutée, à attirer des investissements qui favorisent le développement local, et à imposer un modèle de coopération équilibré avec certaines grandes puissances. 


Ce n'est pas gagné au vu de la corruption qui mine tous les projets et du joug politique imposé par des pays nouvellement arrivés en conquérants comme l'Iran la Russie et la Turquie.


Quant à la France, la mollesse et les orientations imposées sans succès par le Quai d'Orsay la fait tomber dans les abysses de l'oubli. Il ne lui reste que le puissant  vecteur de la langue.



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lundi 8 septembre 2025

IL n'y a plus d'ethique chez les journalistes. (FR). JBCH N° 350


Deux journalistes dits de gauche pris en flagrant delit en complotant pour éliminer une Ministre de la course à la Mairie de Paris , c'est devenu malheureusement courant dans notre République, 



L’affaire dite Legrand-Cohen illustre de façon éclatante la fragilité de l’audiovisuel public français lorsqu’il est confronté à des soupçons de collusion politique. Deux figures médiatiques, Thomas Legrand et Patrick Cohen, tous deux éditorialistes respectés du service public, ont été filmés à leur insu lors d’une rencontre avec des cadres du Parti socialiste. 



Patrick Cohen


Rien d’illégal en soi à prendre un café avec des responsables politiques. Mais ce qui a déclenché le scandale, ce sont certains propos captés dans la conversation, notamment cette phrase de Legrand : « Nous, on fait ce qu’il faut pour (Rachida) Dati, Patrick [Cohen] et moi. »


Thomas Legrand


À travers cette formule ambiguë, immédiatement exploitée par leurs adversaires médiatiques et politiques, les deux journalistes ont semblé avouer un engagement actif contre la candidature de Rachida Dati à la mairie de Paris. Or, Mme Dati n’est pas seulement maire d’arrondissement : elle est aussi ministre de la Culture, donc directement concernée par le sort de l’audiovisuel public. Le soupçon de complot politico-médiatique prend alors une dimension explosive.


Neutralité compromise et crédibilité écornée


La déontologie journalistique repose sur un principe fondamental : l’indépendance. Lorsque des journalistes de premier plan, travaillant pour France Inter ou France Télévisions, laissent entendre qu’ils peuvent « faire ce qu’il faut » pour entraver une carrière politique, c’est la crédibilité de l’ensemble du service public qui se trouve menacée. Même si Legrand a tenté de rétropédaler, en parlant d’une « maladresse » et d’une phrase sortie de son contexte, le mal est fait.


Car la perception compte autant que la réalité. Aux yeux de nombreux citoyens, il s’agit d’une confirmation de leurs soupçons : les médias publics, financés par l’impôt, seraient en réalité dominés par une élite parisienne de gauche, décidée à peser sur les équilibres politiques. À droite comme à l’extrême droite, l’affaire a servi de catalyseur : Éric Ciotti a réclamé une commission d’enquête sur la neutralité de l’audiovisuel public ; Marine Le Pen a aussitôt relancé son idée de privatisation, estimant que les Français pourraient économiser quatre milliards d’euros par an.


Une instrumentalisation politique inévitable


L’onde de choc dépasse la simple querelle journalistique. Pour Rachida Dati, l’occasion était trop belle : elle a dénoncé des « propos graves et contraires à la déontologie », appelant chacun à « prendre ses responsabilités ». Ses soutiens soulignent qu’au moment même où elle défend au Parlement la création d’une grande holding de l’audiovisuel public, cette affaire révèle l’hostilité d’une partie des journalistes financés par l’État à son égard. Ses adversaires, à gauche, dénoncent au contraire une manipulation orchestrée par l’extrême droite via la diffusion de la vidéo par L’Incorrect.


Ainsi, le scandale alimente un double procès : celui du manque de neutralité de certains journalistes, et celui de la guerre politique visant à affaiblir l’audiovisuel public pour mieux en préparer la privatisation. Dans les deux cas, c’est la confiance des citoyens dans la presse qui sort ébranlée.


Liberté de la presse et piège de l’image volée


Il ne faut pas négliger un autre aspect : la captation clandestine de cette conversation, dans un café parisien, constitue elle-même une atteinte à la vie privée et peut relever de l’infraction pénale. Thomas Legrand a mis en garde contre un « piège évident » : si une vidéo volée suffit à jeter l’opprobre sur une profession entière, c’est toute la liberté de la presse qui est fragilisée. Mais là encore, le problème réside dans l’écart entre le discours et la perception : quelle que soit l’illégalité du procédé, les propos enregistrés existent, et ils sonnent comme une trahison de l’impartialité attendue.




En définitive, l’affaire Legrand-Cohen illustre un dilemme profond : les journalistes doivent pouvoir débattre, rencontrer et même contredire les responsables politiques, mais la frontière entre analyse critique et engagement partisan est extrêmement ténue. 


Ici, elle a été franchie, du moins en apparence, et la sanction symbolique n’a pas tardé : suspension de Legrand, tollé médiatique, motion politique contre le service public.


Au-delà du cas individuel, cette affaire fragilise l’ensemble du système : elle nourrit la suspicion, renforce les discours populistes anti-médias et met en difficulté le projet de réforme du secteur audiovisuel. En politique comme en journalisme, la crédibilité est une ressource fragile. Un seul café, un seul mot de trop, et c’est tout un édifice de confiance qui s’écroule.


On s'aperçoit comment le conflit du Proche Orient est traité subjectivement sur les antennes Tv et radio du Service Public, avec les information transmises par l'AFP, agence ô combien corrompue 





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Zelinsky et Zaloujny Rivaux et Maîtres de l'Ukraine de demain. (FR). JBCH N° 349

Après trois ans de guerre, Zelinski semble épuisé, il est sur tous les fronts et parcourt les pays pour recevoir de l'aide, il a fait le maximum, et il faudra penser à la relève.


On pense au général, grand stratège vaiqueur des russes au premier round, et renvoyé un moment à Londres Valeri Zaloujny.




Depuis son limogeage en février 2024, l’ancien commandant en chef des armées ukrainiennes, Valeri Zaloujny, vit une forme d’exil diplomatique à Londres. Officiellement ambassadeur auprès du Royaume-Uni, il incarne bien plus qu’un simple diplomate. Héros de la résistance ukrainienne dès 2022, stratège respecté qui a su contenir puis repousser l’assaut russe, il est devenu une légende vivante. Or, en politique, les légendes sont autant des atouts que des menaces. 


Zelensky, conscient de la popularité grandissante de son général, a choisi de l’éloigner de Kiev, mais cette mise à distance a paradoxalement renforcé les spéculations : Zaloujny veut-il, tôt ou tard, remplacer le président ukrainien ?



Pour l’instant, la réponse est nuancée. D’un côté, Zaloujny fait preuve d’une loyauté exemplaire envers Zelensky, refusant même les ouvertures américaines qui tentaient de tester son ambition politique. Il a juré de ne pas critiquer le président en temps de guerre, et cette discipline semble sincère. 


De l’autre, les sondages et l’opinion publique le désignent déjà comme un “plan B” crédible, le seul capable d’incarner une alternance sans fragiliser la nation. Dans les cercles civils comme militaires, son nom revient avec insistance comme celui d’un chef potentiel de l’après-guerre. Sa force réside dans son image : patriote incorruptible, il ne doit rien aux clans politiques traditionnels. 


Son autorité repose sur la victoire militaire et sur une légitimité forgée au feu de la bataille. Ce profil rappelle celui d’autres héros nationaux, comme Charles de Gaulle en France ou Moshe Dayan en Israël. Dans une Ukraine encore en guerre, cette aura pourrait séduire une population qui voit dans l’ordre et la discipline militaire une condition de survie. D’ailleurs, Zaloujny a déjà laissé entendre qu’il s’inspirerait du modèle israélien : un État en alerte permanente, où la politique et la défense sont intimement liées.




Cependant, cette stature héroïque soulève des questions. L’art politique ne se limite pas à la stratégie militaire. Il exige le compromis, la négociation et la gestion des équilibres partisans et diplomatiques. Zaloujny, secret, franc et discipliné, n’a pas encore montré qu’il maîtrisait ces codes. Là où Zelensky s’est révélé un communicateur hors pair et un bâtisseur de réseaux internationaux, Zaloujny demeure sobre et discret. Ce qui fait aujourd’hui son aura pourrait, demain, se transformer en handicap si la société ukrainienne, lassée de la guerre, réclame avant tout des solutions concrètes pour la paix et la reconstruction.




Mais réduire l’avenir de l’Ukraine à une confrontation entre Zelensky et Zaloujny serait incomplet. Derrière les figures, c’est tout un peuple qui se lève. Depuis 2014, date de l’annexion illégale de la Crimée par la Russie, l’Ukraine vit dans l’épreuve. La guerre hybride puis totale a marqué une génération entière. Pourtant, loin d’affaiblir la nation, elle l’a consolidée. La jeunesse ukrainienne, celle qui avait 10 ou 12 ans au moment de la prise de la Crimée, est aujourd’hui adulte. Ces jeunes, forgés dans les privations et les bombardements, ont intégré la résistance comme un état naturel. Ils ne se battent pas seulement pour repousser l’envahisseur, mais pour construire une Ukraine libre, européenne et démocratique. Leur inventivité se déploie dans l’usage des drones, du cyberespace, de la logistique numérique : le pays est devenu un véritable laboratoire de défense moderne.




La relève se manifeste aussi dans la société civile. Associations de familles de soldats, ONG d’aide aux blessés, réseaux de soutien aux réfugiés et groupes de hackers patriotiques participent à l’effort national. Chaque missile tiré par Moscou renforce non la peur, mais l’unité et la détermination nationale. Là où la Russie impose la soumission par la répression, l’Ukraine oppose la cohésion volontaire et l’adhésion citoyenne. L’objectif n’est plus seulement de résister : il est d’envisager la victoire. Certes, la supériorité matérielle et numérique de la Russie reste écrasante. Mais l’Ukraine parie sur le temps long : l’usure de l’armée russe, l’impact des sanctions économiques et la lassitude d’un peuple privé de liberté. L’alliance de la jeunesse inventive, d’une armée aguerrie et de soutiens occidentaux donne à l’Ukraine une véritable chance, non seulement de survivre, mais de l’emporter.


Cette victoire ne sera pas nécessairement militaire. Elle résidera déjà dans le fait de maintenir vivante une nation que Moscou voulait effacer. Depuis 2014, chaque année de résistance est une victoire identitaire. Aujourd’hui, la relève ukrainienne veut transformer cette survie en renaissance. 


Dans cette dynamique, Zaloujny occupe une place singulière. Il n’a pas précipité son destin politique, mais il ne peut pas l’ignorer. Figure héroïque de la guerre, diplomate malgré lui, il est devenu le réceptacle des espoirs d’une Ukraine qui aspire à la fois à continuer le combat et à préparer l’avenir. Sa prudence – refuser de fragiliser Zelensky en pleine guerre – est peut-être le signe d’un futur homme d’État.


En définitive, la véritable question n’est pas de savoir si Zaloujny veut remplacer Zelensky aujourd’hui. Elle est de savoir si, demain, l’Ukraine pourra se reconstruire sans lui. Car dans un pays où chaque génération produit ses héros, la relève est déjà là, prête à écrire le prochain chapitre de l’histoire ukrainienne.


 

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